• La Liberté ou la mort : analyse du roman

    La Liberté ou la mort, de Nikos Kazantzaki. 1956, éditions Plon, collection Presses pocket. Titre original : « Le Capétan Michel »

     

     

     Le Capétan Michel,  a été écrit par Nikos Kazantzaki en 1953 et publié en 1956 sous le titre La Liberté ou la mort aux éditions Plon, dans la traduction de Gisèle Prassinos et Pierre Fridas.

     

    Eloge 

    Ce livre dit l’amour de la Crète : on y vit,  on y reconnaît, on y sent vibrer l’âme crétoise. On y respire le parfum des citronniers, l’odeur de la terre et des pierres, la brise caressante et tiède. Il évoque la lumière sur les rochers crétois,  la douceur de la terre nourricière de l’homme, qu’elle soit crétoise, turque ou autre. La sensualité du raki et la suavité du narguilé. Candie à l’heure turque. Douceur grecque, douceur orientale.

     

                C’est un livre aux mille portraits, aux mille histoires d’hommes ou de femmes à l’étrange destin : celle du bossu qui creusa la montagne, celle de la vieille qui attendit vingt ans la mort blottie comme un fœtus dans une caverne, celle du centenaire analphabète qui n’apprit à lire qu’au soir de sa vie pour pouvoir revêtir son village d’inscriptions hostiles à l’ennemi, celle du Turc qui aimait le porc et la sainteté, celle de la vieille qui fit fusiller son fils car elle savait la douleur des mères en deuil de leurs enfants, celle du Crétois qui porta son âne sur son dos dans la mosquée.

     

                Ce livre raconte des passions héroïques, les actes démesurés d’hommes qui méprisent à la fois la mort, les femmes, les Turcs, -ennemis héréditaires, les intellectuels, les européens, les métropolites et les higoumènes, mais qui sont si près de leur idéal et du Dieu universel. Il fait vivre des hommes qui sont parfois des fauves, des tueurs presque saints.

     

                C’est le roman d’un auteur qui s’interroge sur sa condition d’homme devant Dieu, paisible, joyeuse, mélancolique ou rebelle. Kazantzaki est celui qui sanglote devant un monde trop beau et trop dur, devant l’énigme de sa condition d’homme, qui lutte pour définir son visage, qui crie sa passion, le mystère de Dieu et cherche à s’en libérer.

     

                C’est un roman qui présente l’Homme comme pris en ce monde entre deux tentations, celle de la terre et de la sensualité, sexe et gourmandise, - quand souffle le vent du sud et que les fruits gonflent, tout le monde fait l’amour - et celle de l’interrogation mystique.

     

    « Aïeul bien aimé (…) tu t’es levé du tombeau et tu as pris la forme d’un rêve pour venir me trouver » écrivit Kazantzaki dans Lettre au Gréco[1]. Kazantzaki à son tour, chaque fois que nous ouvrons ce roman multiple et foisonnant, devient notre aïeul, se lève et vient nous enchanter.

     


     

    Résumé

    C’est l’histoire d’une révolte crétoise contre l’occupant turc, l’histoire de deux peuples ennemis, qui s’affrontent et se ressemblent : désirs de vengeances, désirs de liberté, massacres, soulèvement, défaite.

    C’est aussi l’histoire de la révolte du capétan Michel, chef de village, chef de clan, chef de guerre au prénom d’archange, contre sa honteuse et obsédante passion pour une esclave fatale, Eminé. Pour elle il quittera le combat au monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ, et à cause de cela le monastère sera détruit ; coupable, Michel se maudira, décidera de tuer Eminé pour s’en délivrer, et se jettera sans retour dans la lutte armée.

    C’est aussi l’histoire, pour certains personnages, de la révélation de l’identité crétoise. Le petit Thrassaki, au fil du roman apprend à devenir un capétan. Pet-de-loup, l’instituteur faible et bossu, l’avorton mâle, se métamorphose, accède au meurtre, à la fornication, au fusil, révélant les qualités de ses ancêtres. Kosmas, l’intellectuel Crétois européanisé et renié, devient un combattant et meurt en symbole de la révolte ; et son éloignement de la race et de la tradition que représentait son mariage avec une juive est anéanti.

    Le roman commence par un portrait de Michel et la présentation de ses amis et voisins habitants de Candie. Le capétan était devenu le frère de sang de Nouri bey,  symbolisant la fraternité humaine et haineuse des deux peuples ennemis qui cohabitent, Turcs et Grecs. Entre les deux hommes liés par le serment, comme entre les deux peuples, le conflit est inévitable ;  « Entre lui et le capétan Michel avait coulé un fleuve de sang » (23) : Manousakas, un frère du capétan, a tué le père de Nouri bey. Puis le capétan l’humilie devant Eminé, une belle circassienne ; le sang des ancêtres se lève en Nouri bey comme il se lève en Michel ; Nouri bey tuera Manousakas, le frère du capétan, mais mourra de ses blessures ; les Turcs n’auront cesse de le venger ; Théodoris, fils de Manousakas tuera des Turcs ; répression et guerre s’enchaîneront jusqu’à la mort de Michel sur son Golgotha.

     

    Epoque

    Le roman commence au dernier jour de mars, en 1889 ;  le récit est daté pages 66 (« au seuil de 1889 », 86 et 159 (« … il y avait onze ans de cela, pendant la Révolution de 1878…»). Une incohérence cependant : il est dit page 476, à la fin du roman, que Sifakas avait 30 ans en 1821 ; comme il meurt centenaire, l’événement devrait se  produire en 1891 ; or le récit semble se dérouler sur moins d’une année.

                    Le roman rappelle un certain nombre d’événements historiques antérieurs :

    -la révolution de 1821 pendant laquelle les Turcs pendirent le Métropolite de Candie ;

    -le soulèvement  de 1854 ;

    -le soulèvement de l’année 1866 pendant laquelle Kostaros tua le père de Nouri ; où Manousakas rencontra sa femme Christina, un 14 juin ; où eut lieu l’explosion du monastère d’Arcadi dans laquelle mourut Kostaros ;

    -le soulèvement de 1870 pendant lequel se battit Katérina, l’épouse du capétan Michel ;

    -le soulèvement de 1878.

     

    Résumé par chapitre

     

    Chapitre 1, pages 7 à 44. Premier soir à Candie : portrait du capétan Michel ravagé de fureurs sombres, de sa sauvagerie, de la sauvagerie et de la détermination de ses ancêtres ; sa fraternité avec Nouri ; problèmes posés par les provocations de Manousakas et le charme d’ Eminé. Problème posé par Kosmas, un neveu de Michel : il est devenu un intellectuel et s’est marié avec une juive. En contrepoint, présentation de personnages du peuple de Candie : marchands, coiffeur, vieilles filles.

     

    Chapitre 2, pages 45 à 87. Nuit et matin : le vent a traversé la ville, un vent de sensualité qui touche aussi bien le Pacha que le Métropolite, le Capétan Michel,  les lépreux, Kayambis et Garouphalia ; histoire de Kayambis ; le peuple de Candie (Touloupanas le boulanger, Kassapakis le docteur) est présenté à son réveil ; projets de sortie et obsession érotique de dame Pénélope ; plusieurs personnages comiques (Effendine, Pitsikolos). Michel va à Saint-Jean sermonner son frère Manousakas. Michel et Nouri envisagent symétriquement les morts de leur famille, morts qui appellent vengeance : le frère de Michel, le père de Nouri ; tous deux chevauchent en colère ; à cause d’Eminé, des hontes sexuelles différentes les habitent ; tous deux rentrent en même temps à Candie, mais par des portes opposées.

     

    Chapitre 3, pages 89 à 118. Nuit de samedi à dimanche ; dimanche. Début de beuverie chez Michel qui veut noyer ses obsessions (avec Effendine, Kayambis, Bertoldo, Ventousos, Yanaros). Messe. Tremblement de terre[2] qui entraîne la rencontre d’Eminé et de Polyxinguis. Différentes scènes de bonheurs grecs et turcs. La petite Charmille est enlevée par des garnements.

     

    Chapitre 4, pages 119 à 151. Apologie de la Russie par l’archevêque. Flash-back : réflexions du pacha, (soucis d’autorité et de sexe). Nouvelle journée de beuverie, jusqu’au mardi matin. Jalousie envers Polyxinguis. Problème du mariage de Pet-de-Loup. Pénitence ridicule d’Effendine. Le souvenir d’Eminé met en rage le Capétan qui vide un café turc de ses clients, poussé par deux démons.

     

    Chapitre 5, pages 153 à 196. Après un orage (métaphorique), discussions chez le pacha, puis chez l’archevêque. Deux images fantasmatiques symétriques : la Crète crucifiée, le paradis du mahométan aux arbres couverts d’armes. Rencontre du pacha et du métropolite. Avril page 173 : amours remâchées du capitan, de Nouri bey ; amours réussies d’Eminé et Polyxinguis. Fin avril page 176. Semaine sainte : montée des tensions. Thrassaki va brûler des maisons juives le jeudi saint (177). Beuverie de trompe-la-mort au cimetière, mardi de Pâques (186) : Polyxinguis dit que sa nièce se marie « après-demain » (187).

     

    Chapitre 6, pages 197 à 228. Mariage de Vanguélio et de Pet-de-Loup : le lendemain est le mercredi de Pâques (205). Rivalité déclarée de Polyxinguis et de Michel. Mort du frère du Capétan, Manousakas le jeudi de Pâques (L’avant-veille, page 212 Michel était entré au café ; la veille Manousakas avait tiré un coup de feu à l’intention de Nouri,  et indiqué que le baïram était le surlendemain, page 205). Enterrement mémorable de Manousakas : on saute au-dessus du mort, par mépris de la mort.

     

    Chapitre 7, pages 229 à 269. Avril passe. Fête du 29 mai de Constantin Paléologue. Maladie de Nouri bey. Malheurs domestiques de Pet-de-Loup. Polyxinguis demande au capétan Michel d’être

    témoin à son mariage : 2ème querelle. Amours de Polyxinguis et d’Eminé, qu’on catéchise. Discussion entre Idoménée et Pet-de-Loup. Début par Théodoris, 40 jours après la mort de Manousakas, de la vendetta (pages 253, 249). Episode autobiographique du nègre Souleïman qui attaque le Capétan au yatagan (pages 256-257) et divers incidents anti crétois. Bertoldo et le muezzin sont symétriquement malmenés. Accalmie et attente. Dimitros Pitsikolos part dans la montagne avec son parapluie. Michel apprend l’infirmité de Nouri, va le voir ; ce dernier se suicide.

     

    Chapitre 8, pages 269 à 302. Enterrement de Nouri : comment sacrifier son cheval ? Reprise de la vendetta (Meurtre de deux vieillards chrétiens. Meurtre d’Agathangélos. Meurtres symétriques. ). Le pacha est débordé. Combats de Théodoris. Rencontre du pacha et du métropolite. Expéditions turques avortées contre le capétan Michel. Fable de Barbayanis dépeignant la vigne dévorée par un bouc. Tourments du pacha. Rêve de fête nationale de Michel. Fantasme guerrier de Michel page 282. Thrassaki parodie la messe. Mort de Diamandis empoisonné par Pet-de-Loup : réaction des différents personnages.  On ferme les portes de Candie (cf. Lettre au Gréco où Les Turcs massacrent les Crétois après avoir fermé les portes de la ville). Les habitants fuient dans les montagnes. Début du ramadan (290). Risques de pogroms anti-grecs. Débarquement  imposant et pittoresque, sous les yeux de Thrassaki, d’une armée turque à Candie. On défonce des maisons. Vanguélio se pend. Hatzissavas est envoyé à Athènes pour demander des secours. Michel se dispute avec Polyxinguis. Pet-de-Loup commence à se métamorphoser. Krassogeorgis va faire sortir ses voisins de Candie. Michel prend la tête d’un groupe combattant, écrit à son neveu Kosmas, sauve Paraskévas de Souleïman.

     
    Chapitre 9, pages 303 à 338.  Au cœur de l’été (317). Bonheur turc en contraste avec une scène de massacre mené par le nègre Souleiman. Mort de Paraskévas, viol de Charmille. Mort d’Idoménée. Effendine sauve Michel en faisant croire à une cavalcade de Saint Minas. Le métropolite exige du pacha une trêve. Michel quitte Candie avec son petit clan (Ventousos, Mistigri, Kayambis, les femmes et les enfants et même Bertoldo) pour prendre part à la révolte ; destination : chez Sifakas à Pétroképhalo. Stéphanis va partir en bateau à Syra. Polyxinguis a établi son quartier général à Kastéli. Jour de l’Assomption (323). Réunion des 14 capétans olympiens ressemblant à des immortels. On fabrique l’armement, on catéchise Eminé ; pensées amoureuses de celle-ci ; dégoût et colère amoureux de Michel. Pet-de-Loup, métamorphosé, soupe chez Polyxinguis ; ses amours à Kastéli. On va partir délivrer le monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ, assiégé pour des raisons expliquées ultérieurement, page 343..
     
    Chapitre 10, pages 339 à 369.  Automne. Evocation de la Crète et de ses souffrances dans l’indifférence de Dieu. Aux revoirs tentateurs de Polyxinguis à Eminé (moment de bonheur éternel « Pense aussi à ta femme, capétan Polyxinguis ! »), puis sobres adieux de Michel à sa femme. Histoire du monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ, du roi Nicéphore qui le fonda, de son higoumène et de la vendetta menée contre lui. Combat de l’higoumène contre trois Turcs le 1er septembre (343). Départ des Turcs pour ce monastère et d’un groupe qui doit enlever Eminé. Mendicité des réfugiés crétois à Athènes. Stéphanis mendie à Syra au nom des insurgés, puis obtient des denrées, un bateau et prend la mer. Ventousos demande à Anopoli l’hospitalité à Georgearos tout en ignorant son deuil, page 348[3]. Mode de vie du coiffeur Zacharias (349). Siège du monastère dégagé par Polyxinguis (350), puis par Michel (354). Honte de Michel qui combat en ne pensant qu’à Eminé. Ventousos lui apprend qu’elle a été enlevée et il déserte. Chute du monastère. Repli de Polyxinguis sur Kastéli. Supplice de l’higoumène. Récit de la délivrance d’Eminé envoyée aux Koriakès chez Kalio, une tante de Michel. Michel arrive au monastère en ruines. Soulèvement de la Crète. Le capétan Elias sermonne Michel à Vryssès (363). Michel tue Eminé aux Koriakès (369).
     
    Chapitre 11, pages 371 à 411. Fin d’automne. Méditation sur la Crète. Sifakas apprend à écrire. Dimitros Pitsokolos fait une brève apparition. On rit de Bertoldo qui charme les femmes. Thrassaki apprend à tirer à la carabine. Mastrapas et Krassseogeorgis viennent chercher refuge chez Sifakas qui accepte d’héberger leur famille mais les envoie tous deux combattre dans la montagne. Thrassaki joue avec Manolios et Andrikos. Les hommes du Capétan menés par Ventousos passent pour décharger le bateau de Stéphanis, arrivé à Sainte-Pélagie. Ventousos raconte à Sifakas la vérité sur le désengagement des puissances européeenes dans les affaires crétoises et sur le comportement du Capétan. Un evzone donne à Sifakas une lettre de son petit-fils Kosmas, qui est à Syra de retour d’Europe (383). Nostalgie de Sifakas qui évoque les jours où ceux de sa génération défiaient la mort dans la danse et le vin. Déchargement du bateau de Stéphanis. Thrassaki lit à Sifakas la lettre de Kosmas : les nouvelles sont très mauvaises. Yanacos, métamorphosé, s’habille en Crétois à cause de son projet de mariage avec Pélagia, la fille du capétan Elias, brûle ses autres vêtements, et reçoit un fusil ; Sifakas maudit les Francs. Mitros l’evzone rejoint Michel. Histoire d’Errico, ou Henri, le Français philhellène impressionnable qui offre ses jumelles à Michel (398) : ces deux faits montrent que la race crétoise prend le dessus. Les troupes turques accentuent leur pression. Jusqu’auboutisme solitaire de Michel et de son clan ; le pacha jure sa perte. Michel attend l’aide de Polyxinguis. Ventousos remet les denrées et munitions apportées par mer. Thrassaki joue à la guerre avec sa bande (Haritos, Manolios, Andrikos) : dispute avec Haralambis pour la prééminence. Haridimos vient les chercher. On apprend que Sifakas voulait savoir écrire « LA LIBERTE OU LA MORT ».
     
    Chapitre 12, page 413 à 455. Hiver. Femmes, enfants et combattants du capétan Michel sont assiégés dans une grotte, mais sauvés par Polyxinguis. Michel révèle à Polyxinguis que la Grèce les a abandonnés, que la guerre est sans issue et qu’il a tué Eminé. Nouveau démon d’orgueil du Capétan : il se déclare au-delà de la mort (415 ; cf. 417 : « Qui peut m’atteindre ? … la mort, elle, ne peut rien sur moi… je suis une espèce d’Arcadi ») ; il veut se faire sauter, comme une Arcadi immortelle. Sifakas couvre le village de l’inscription « La Liberté ou la Mort ». Arrivée et passé de Kriaras le rimeur ; il donne de fausses nouvelles réconfortantes puis il développe la métaphore de la Crète souffrante et du Christ page 423. Point de vue du pacha sur la révolte ; Sélim, son esclave noir, lui fait part des prédictions d’Hamidé Moula pour le réconforter, puis point de vue inquiet du métropolite qui attend Kosmas, messager envoyé par la Grèce. Arrivée de Kosmas et Noémi à Candie. Histoire de la sœur de Kosmas, Maria, rendue folle par le père (429). Le fantôme du père hante la maison. Rencontre conflictuelle de Noémi et de sa belle famille. Kosmas apporte au métropolite les nouvelles de Grèce ; le métropolite envoie Kosmas en mission auprès de Michel pour le convaincre d’arrêter le combat. Anecdote du berger crétois libre (elle est aussi dans Lettre au Gréco). Récit de la rencontre de Kosmas avec Noémi la désespérée, page 439. Malaise et fantôme chez Kostaros. A Pétroképhalo, Sifakas va écrire sur l’église de son village et tombe. On  va chercher Moustapha Baba pour le soigner. Sifakas envoie Kostandis chercher trois capétans centenaires (Mandankas, Katsirmas, et le maître d’école d’Ebaro) et Kosmas pour qu’ils assistent à sa mort page 451. Conférence entre le Capétan et Polyxinguis sur la nécessité de la reddition. Michel envoie Ventousos, Kayambis et Mistigri dire au métropolite qu’il ne se rend pas. Kosmas veut emmener Noémi avec lui dans la montagne, mais elle a un malaise.
     
    Chapitre 13, pages 457 à 491. Brève évocation de la Crète. Kosmas, conduit par Kostandis parcourt la montagne crétoise et se sent appelé au combat. Kostandis lui raconte le mariage de Sifakas et de Lénio, puis la façon dont il a égorgé Hussein l’Albanais, pour lequel il a fait vœu de boire l’eau du ruisseau où il l’a tué à chaque fois qu’il y passerait, et enfin l’héroïsme maternel de Kostandinia ; Koubélina raconte elle-même ses actions héroïques ; on mentionne les morts mal enterrés de ce village détruit (l’auteur multiplie les signes de vives douleurs ineffaçables, le souvenir brûlant des massacres) ; Koubélina garde les pierres rougies du sang de son fils ; Kosmas l’intellectuel va devenir un guerrier. Inversement, Sifakas qui se fait porter dans sa cour pour mourir, se pose des questions philosophiques : il interroge les trois vieux capétans sur le sens de la vie : Mandakas répond qu’il a vécu en aveugle mais que le sens de la vie est de réaliser sa liberté ;  Katsirmas le corsaire répond que vivre c’est assumer sa nature de fauve ;  le maître d’école d’Ebaro répond en jouant de la lyra, exprimant ainsi les sentiments qui bercent l’âme, l’idée d’harmonie qui règle le monde, la réalité de l’appel divin qu’exprime la musique, la nature de l’âme ; il répond donc que la musique exprime la douceur surnaturelle de Dieu qui nous appelle et qui est la vraie aspiration de notre nature. Mort de Sifakas en harmonie avec la musique. Kosmas dort avant de partir trouver Michel et rêve du fantôme terrible de son père : celui-ci va s’en prendre à Noémi.
     
    Chapitre 14, pages 493 à 526. L’hiver. Kosmas monte avec Haridimos dans la montagne. A Candie, les habitants reprennent leur routine, comme Polyxinguis, démoralisé, ruminant son regret d’avoir déposé les armes, ou comme le pope Manoli. Stéphanis va mourir, les jambes arrachées par un boulet. Ventousos décide de repartir combattre. Négociations financières entre le métropolite et l’usurier Harilaos qui, en profiteur, refuse de prêter à faible intérêt aux Crétois ruinés par la guerre. Pet-de-loup fait des leçons patriotiques à ses élèves. C’est la veille des vacances de Noël. Barbayanis et Effendine, toujours compères, se livrent à la bouffonnerie. Le métropolite et le pacha se rencontrent chez Archondoula: ils dorment. Retour de Pitsokolos ;  Aristotélis pleure sur la transmission de sa boutique ; comme pour Kassapakis, leur vie reprend comme au début du roman. Noémi prie la Vierge, mais le fantôme du beau-père la frappe au ventre, et elle fait une fausse couche. Pensées de Kosmas dans la montagne qu’il gravit avec Haridimos pour aller trouver Michel ; la Crète, la culpabilité, l’appel du combat ressuscitent en Kosmas : il se demande quelle est sa place ; Haridimos lui raconte l’histoire d’Androulios, l’avorton bossu qui a taillé le village de Vénérato dans la montagne. Ultime combat de Michel : il a compris que le bien était la liberté et la mort ; un certain Yanaros choisit de quitter le combat avec Krasseogeorgis, Mastrapas et 20 hommes ; 6 hommes restent : Mistigri, Kayambis, Théodoris, et deux colosses. Arrivée de Kosmas, puis de Ventousos. Mort de tous ces combattants, le Capétan brandissant fièrement la tête de son neveu comme un drapeau d’immortalité, un symbole de la Crète éternellement révoltée et renaissante, éternellement libre.
     
     
    La signification du roman 

     

    I) La liberté et le combat

                La liberté et la mort, lit-on à la fin du roman, La Liberté ou la mort, page 518, et ce « et » semble l’ultime formulation par le capétan Michel du sens qu’il donne à sa vie. La mort le libère des démons intérieurs et entre autres du démon patriotique. La mort est libre choix, aboutissement logique, libre réalisation d’un destin que l’homme s’est choisi ; non pas suicide mais orgueil d’être. Il n’y a pas de salut, disent les combattants à la fin du roman : la mort libère de cette impasse.

                La liberté et la mort, c’est une morale du combat ; avoir une âme, c’est lutter, lutter pour se libérer : «  L’âme humaine n’est pas un marchand, capétan Kabanaros, c’est un combattant (...) ;  l’âme humaine … tient une épée » disent les vieux Grecs qui tiennent conseil pendant la révolte armée (La Liberté ou la mort, page 328). « Et tu te crois le seul à avoir une âme ? », dit Théodoris à Michel pour lui montrer qu’il est prêt à mourir sur le mont Séléna.

                La vie véritable, la vie virile est celle de Michel, elle est exemplaire car elle est une vie que l’homme donne au monde, réalisant l’héroïsme de vivre, sans espérance, comme un roi qui a choisi sa voie et abandonne la gloire, l’espérance, la peur et plonge dans l’abîme.[4] Elle est un sacrifice de soi pour se réaliser.

                Cette vie était celle du père de Kazantzaki: « Mon père était un guerrier et la guerre était le chemin qu’il empruntait pour délivrer et pour se délivrer. »[5]

    A la fin de Lettre au Gréco[6], Kanzantzaki lui-même, lutteur mystique, se compare à un guerrier : «  je suis couvert de blessures et je me tiens debout (…)  je suis couvert de blessures, toutes reçues de face. »

               

     

     

     

    II) L’amour de l’humanité

    1. Deux peuples qui devraient fraterniser.

    Grecs et Turcs sont frères et Kazantzaki souligne leur ressemblance en faisant vivre des personnages symétriques : Effendine Crottin et Barbayanis, tous deux bouffons, tous deux les seuls à pouvoir voir Saint Minas ; le Pacha et le Métropolite, les deux vieillards qui vivent dans le luxe ; Nouri Bey et le capétan Michel, les deux frères de sang qui incarnent la virilité, aiment la même femme et dans le sang de qui vivent d’exigeants ancêtres, et qui chevauchent l’un sa jument blanche et l’autre son étalon noir au même moment ; le muezzin et Polyxinguis qui se réjouissent semblablement et au même moment du bonheur de Candie (page 84, La Liberté ou la Mort).

                Crétois et Turcs ont les mêmes aspirations. On lit page 98 dans La Liberté ou la Mort : « Comme les chrétiens, ils (les musulmans) ne  demandaient pas grand chose, eux non plus : une bonne nourriture, de braves femmes, un cœur content ; aussi bien dans ce monde que dans l’autre ». Page 112, ibidem,  ils éprouvent le même bonheur dans Candie, après le tremblement de terre. Ils éprouvent également les mêmes fureurs vengeresses.

                L’un et l’autre peuple regrette le prix du sang qu’il faut payer : page 331 on se prépare au combat ; « -Qui boira ce vin, se demandaient les Crétois, qui pétrira le pain de la nouvelle récolte, qui fêtera Noël ? Les mères regardaient leurs gaillards de fils, les femmes regardaient leurs maris et leurs sœurs, meurs frères. Elles les regardaient et voyaient la Mort derrière eux. » Et page 352 : « …les soldats turcs ensevelissaient leurs morts, aux aussi et soignaient les blessés. Silencieux, ils regardaient les feux allumés et pensaient à leurs femmes et à leurs enfants laissés là-bas au fin fond de l’Asie Mineure. Qui labourerait le champ, qui creuserait la vigne, Qui apporterait du pain à la maison pendant leur absence ? »

     

    2. Une humanité multiple sous le regard de son créateur

                Kazantzaki fait vivre toute une humanité comique, l’histoire de mille vies sous le regard de son créateur, Dieu ou le romancier, une comédie humaine crétoise (et dans une mesure moindre, turque). Parce que notre monde est fait de milliards de vies, le roman, à l’image de ce monde, fourmille d’existences admirables, pittoresques ou drôles, et leur nombre témoigne de la puissance de la vie. On voit donc tout un peuple crétois aux mille personnages et aux mille historiettes, telle celle de Pet de loup qui empoisonna son beau-frère et  dont la femme se pendit ; celle de Barbaryanis le marchand de glaces bouffon héroïque au jour de saturnales, celle des six clients du capétan Michel, obligés de ripailler en carême sur l’ordre de leur patron. Celle d’Effendine Crottin, le turc à la voix d’ange qui n’ose traverser le grand fleuve des rues. Celle du rabbin innocent qui offre une rose à un incendiaire. Des femmes effacées, obéissantes De frivoles commères. Des mères héroïques qui sacrifient leurs enfants pour sauver ceux des autres femmes.

              A cette humanité participent des personnages remarquables, parfois si fameux que leur introduction dans le roman donne lieu au développement d’une anecdote, même si ce sont des personnages très secondaires, inutiles à l’intrigue ; parfois leur histoire est une allégorie qui révèle leur rapport à la mort ; par exemple la grand-mère de Michel  (page 10), ou Kollyva, le fossoyeur. Kayambis, lui, un jeune époux arraché à la vie pour aller mourir au Séléna, se cache parce qu’il a tué son frère ; ainsi ce personnage secondaire est-il une allégorie de l’humanité, de Caïn tuant Abel, des Crétois et des Turcs en lutte. Parfois parce que ces personnages, comme l’Higoumène du monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ, ont un passé héroïque qui fait d’eux des crétois mythiques.

     

    3. Une humanité regardée avec amour

    Je crois que Kazantzaki regarde bon nombre de ses personnages avec attachement et attendrissement, quand leurs petits défauts font leur prix, car la vie les ridiculise ou les meurtrit et ils ont droit à son amour : c’est  peut-être le regard de Dieu sur sa création. Ainsi, Kazantzaki écrit dans Lettre au Gréco, à propos de ses voisins (page 59): « Je ne peux pas me souvenir de nos voisins sans que montent en moi à la fois le rire et les larmes. Les hommes alors n’étaient pas tous coulés dans le même moule, à  la douzaine, mais chacun d’eux était un monde à part, il avait ses bizarreries à lui, sa façon propre de rire, de parler, il s’enfermait chez lui, gardait cachés par pudeur ou par crainte ses désirs les plus secrets et ces désirs se déchaînaient en lui et l’étranglaient, mais il ne parlait pas et sa vie prenait un sérieux tragique.»

    Cet extrait contient selon moi la double vision de Kazantzaki sur le monde : une création pittoresque, aimée ; mais le constat que les hommes, insatisfaits et tragiques ne réalisent pas leur être.

     

    III) Le bonheur de vivre

                Cette humanité tragique et drôle,  goûte le plaisir de vivre, de participer avec bonheur à la comédie humaine. Dans la Liberté ou la mort, des hommes de trois religions, le rabbin (page 431), le muezzin (page 84), l’higoumène (page 343), Polyxinguis jettent un regard d’admiration sur la beauté du monde. Beauté de la nature, sous le regard de Dieu.

    Le roman développe le thème de la douceur de vivre en Crète, de la campagne qui nourrit comme une mère ; la Crète est luxuriante avec ses oliviers, ses vignes, ses troupeaux ; le narrateur mentionne, comme dans Alexis Zorba, le vent qui fait pousser les concombres et gonfler les seins. Par exemple le magasin de sieur Dimitros, page 10, regorge d’épices ; Dimitros lui-même, gourmand, tient un journal des nourritures dont il s’est délecté. La maison de Nouri regorge d’objets luxueux, page 29. Le café de Candie semble le paradis terrestre : chants, narguilés, beautés des deux sexes, calme, odeurs de citronnier, de chèvrefeuille, de basilic : « les Candiotes s’arrêtaient et aspiraient l’air odorant, enivrés par tant de douceur », page 113. Garouphalia trouve le bonheur dans la sexualité et pense, en regardant son mari et les rues brillantes, odorantes et fleuries de Candie, page 90 : «  Qu’est-ce qu’ils racontent,  les popes ? Le paradis, c’est ça, c’est ici ! Mon Dieu, je t’en prie, ne m’en donne pas d’autre ! »

    Dans Lettre au Gréco, page 179, Kazantzaki raconte qu’il a été hébergé par une vieille femme ; le repas sentait bon, la vieille revivait : « j’ai senti une fois encore combien le bonheur sur la terre est fait à la taille de l’homme. ».

    Kazantzaki exprime donc le plaisir de vivre, la tentation qui dirait que le paradis terrestre est chez les hommes, fait des bonheurs de l’amitié et des sens ; cela  rappelle La Dernière Tentation du Christ, où Kazantzaki représente Jésus sur la Croix rêvant de s’asseoir sur le seuil de sa maison, tenue par Marthe et Marie, tandis que passerait au loin le cortège dépenaillé et furieux des apôtres.

     

    IV) L’évocation de la Crète

    Elle est un être vivant qui bouge dans le tremblement de terre (105-106), vivante et sensible comme une personne, pour Michel, faite de milliers d’ancêtres toujours vivants dans son sol (262)

    Elle est évoquée aussi comme pauvre mère souffrante, page 326, au conseil des capétans. « Cette mère en deuil, pieds nus, affamée, ensanglantée les bras levés vers le ciel ».Elle souffre de sa servitude et de la mort de ses enfants. Kriaras le rimeur, page 423 dépeint la Crète délaissée de Dieu à qui le Christ confie un anneau : anneau de chaîne, ou anneau de fiançailles ? Et les Crétois de souffrir dans l’incertitude d’une aide divine.  Sur un dessin de Mourtzouflos, page 163, la Crète est identifiée au Christ agonisant, et elle pleure car Dieu l’a abandonnée à ses bourreaux. Justement, Dans Lettre au Gréco, Kazantaki raconte que, jeune, il avait interprété une icône comme le symbole de la Crète opprimée : ange et diable étaient respectivement le roi des Grecs et des Turcs.

    Elle est aussi une mère sacrée car elle engendre des héros (page 457) : elle incarne le mystère de la maternité et le mystère de l’héroïsme. Elle est alors la sainte Crète, voire un miracle accueillant, vivifiant, régénérateur, créateur : « Le mystère de la Crète est profond. Celui qui met le pied sur cette île sent une force mystérieuse, chaude, pleine de bonté, se répandre dans ses veines, et son âme grandir. » [7]

    Elle saigne ses fils et est comparée à une bête dangereuse par Kosmas, page 430.  Il ajoutera : « La Crète a quelque chose d’inhumain. On ne peut savoir si elle aime ou si elle déteste ses enfants. Ce qui est certain, c’est qu’elle les fouette jusqu’au sang » (467). Elle ressemble à un monstre marin gisant sur la mer, pages 92,  93 [8].

    Elle est enfin l’allégorie de la révolte, incarnée en cela par Michel : « La Crète, c’est moi », dira-t-il.

     

    V) Un tableau de la barbarie : des exempla virtutis, des modèles de vertu et de virilité.

    1. Un peuple dur

    La Liberté ou la mort comporte non seulement des passages héroïques, mais aussi un exotisme de la dureté, du « être un homme », de la virilité farouche, de  la violence qui se fait obéir. Morts, massacres, supplices.

    Les personnages sont qualifiés de « fauves » ; le cheval, admiré les hommes au début de La Liberté ou  la mort, est l’emblème de la force sauvage de la nature.

    Les Crétois apparaissent comme un peuple barbare : il refuse l’éducation, méprise les instituteurs, l’Europe (page 158), méconnaît son passé minoen et néglige les « bizarreries » qu’exhument les fouilles. Thrassaki, qui fait l’admiration de son père est un petit voyou qui capture une fille, met le feu chez le rabbin, méprise les faibles. On roule les cartouches dans les feuilles des vieux livres des monastères. Le vieux Sifakas se marie dans la violence, menaçant d’incendier des maisons et enlevant sa fiancée.

    On retrouve cette barbarie dans le tableau que fait Kazantzaki de sa famille dans Lettre au Gréco : ils viennent d’un village nommé Les Barbares et sont capables, comme le capétan Michel, de tuer la femme qu’ils aiment, de se taillader pour apaiser leurs passions et de refuser de faire l’amour en temps de guerre.

    Ivresse, colère, amour, sentiment d’injustice, rébellion contre Dieu ou diable sont les démons qui habitent ce peuple de révoltés (page 66) à l’âme d’acier, d’hommes terribles (page 10) appelés à souffrir (page 69). A la fin du roman meurent  les personnages de quatre générations, l’aïeul Sifakas, Michel, Kosmas, et son bébé. Mais ils sont tous exemplaires, ou sacrifiés à l’intransigeance de la race ou aux exigences du combat. Leurs morts expriment la force de la Crète et suggèrent son éternité, tant cette race d’hommes marque de son empreinte ses descendants : même Kosmas l’occidental, même Ventousos, le joueur de lyra oenophile,  meurent dévoués à la Crète.

     

    2. L’hérédité

    Les Crétois sont conçus comme une race, où les personnages héritent leur destin de leurs aïeux : le capétan Michel est la résurrection de son grand-père Michel le Fol (page 9) ; et son fils Thrassaki ressuscite en lui (page 283). De même Manousakas ressuscite en Théodoris (page 275) et en Kosmas.

    Le saint higoumène de la page 344 sent vivre en lui ses ancêtres, comme Michel, comme d’autres. Parfois ils réclament vengeance à leurs descendants. Parfois leur fantôme semble se matérialiser et agir sur les vivants, comme Kostaros sur Noémi. Pages 105-106 de Lettre au Gréco, la réalité de la présence des ancêtres, qu’ils vous répondent au cimetière ou habitent les vivants, est affirmée. Cette donnée psychologique explique le caractère intransigeant et violent des personnages, poussés à agir par les fauves dont ils descendent et qu’ils admirent, mais elle implique aussi que les personnages n’échappent ni à leur sang, ni à leur parents : c’est une fatalité, c’est un destin, c’est la fierté qui les pousse à se révolter ou à dévorer la vie ; c’est aussi un pas vers l’immortalité, car les ancêtres existent par-delà la mort, dans l’autre monde assurément, mais aussi dans le nôtre.

    S’esquissent alors des demi-dieux tentés de défier la mort.

     

    3. Le mépris de la mort

    Il est affiché par ceux qui sautent au-dessus du cadavre de Manousakas après avoir festoyé près du mort : sauter et manger, c’est affirmer son énergie vitale, les forces de la vie. Kollyva le croque-mort qui dépouille les cadavres est insensible à la mort : celle de sa femme ne lui arrache pas un mot d’émotion. Polyxinguis méprise aussi la mort, au nom de son amour de la fête : il a préparé dans son sépulcre une armoire de raki (page 82) : il boit et chante avec Idoménée, Kollyva et Ventousos. De même des ancêtres dépeints par Sifakas avaient ripaillé et frappé le sol, lieu de l’ensevelissement (page 385) : étaient réunis dans cette scène  la danse, le vin, le bouc égorgé, les chantres ; tout le village, des fauves aux mollets poilus, frappait la terre pour dire son mépris de la mort ; le tableau que fait d’eux Sifakas effraie l’un, qui voit en ces morts des êtres à part (en cela il les divinise), mais emporte l’adhésion enthousiaste du petit-fils de Sifakas. Sifakas reproche leur mort à Dieu : en cela il lui tient tête, devient comme un dieu, comme ses contemporains qui méprisent la mort, ses contemporains qui déchaînent leur animalité (des fauves, le bouc égorgé, l’ivresse) pour accéder à un changement de statut. Cette forme de révolte est inscrite en Sifakas, le centenaire exemplaire, unanimement admiré, qui incarne un Crétois supérieur.

     

    4. Certains personnages ont un caractère divin

    Pages 12-13 arrive un montagnard qui ressemble à  un bouc et à saint Mamas, le patron velu des bergers ; Kostandis, quant à lui, est « mi-homme, mi bouc » : ces personnages sont empreints d’animalité, celle des fauves dont ils descendent, ou celle des satyres de l’Antiquité. La race semble alors remonter à des temps immémoriaux. Sifakas, « rappelait un de ces dieux immortels de l’Antiquité » (page 324). Comme Alexis Zorba il a u n formidable appétit de vivre : « il avait encore soif du monde » (page 323), et incarne l’énergie vitale.

     

    5. La mort exemplaire : des exempla mortis 

    La mort complète le portait du personnage. Ces morts ou ces attentes de la mort ne sont jamais ridicules ; elles définissent l’individu dans son rapport à la vie, à l’au-delà, au passage. La mort est celle qu’on attend volontairement et qui est à l’image de notre être.

    La grand-mère de Michel, ermite de la mort, l’attend pieusement 20 ans, recroquevillée dans une grotte, son tombeau, un crucifix à la main.

    Katsirmas, lui, veut mourir comme une pieuvre tapie dans les rochers, seul, ignoré, car il est désespéré de lui-même : « Celui qui n’a plus de force, disait-il, n’a pas droit à la vie. » (page 325 de La Liberté ou la mort). Ce qui est conforme à sa conception de l’existence. Ce pirate n’a vécu que par la force, et au nom de la force ; sénile, il ne se reconnaît plus que le droit à se cacher.

    On retrouve les mêmes vieux moines pleins de foi dans La Liberté ou la mort, (page 284), et dans Lettre au Gréco, pages349- 350 : un higoumène a préparé sa tombe ; il y a gravé le mépris de la mort : « Hé, hé, la mort, je n’ai pas peur de toi ! », car  il attend l’immortalité ; et il ajoute : « Pourquoi en aurais-je peur de la vieille masque ? C’est une mule, je la chevaucherai pour qu’elle me mène jusqu’ à Dieu. »

    De même l’higoumène du monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ meurt (page 361), supplicié et joyeux dans une vision patriotique et chrétienne à la fois.

    Sifakas avait prévu sa mort, gardant un bélier noir pour son enterrement (page 323). Il meurt au milieu de sa ferme, en propriétaire, étendu de tout son long sur la terre qui l’a créé, à son contact, comme Zorba au contact des éléments[9], en homme avide de respirer le monde ; enfin sa mort en public, dans la cour, est celle du patriarche qui règne sur son clan et, en le voyant, Kosmas s’étonne qu’on puisse mourir avec tant de grandeur (page 451). Elle rappelle celle du grand père de l’auteur faisant ses dernières recommandations (agricoles et mythologiques) à ses fils, et bénissant son petit fils (Lettre au Gréco, pages 61 et suivantes.).

    Michel enfin meurt en haut d’une colline plus près de Dieu, brandissant une tête coupée comme étendard de la Grèce, fixant ainsi la figure du Révolté.

     

    VI) La religion  

                La religion n’a pas la part belle. Ainsi la femme de Kosmas, à la fin de La Liberté et la mort, prie-t-elle en vain la Vierge.  Le pope de Candie Manoli exerce son sacerdoce comme on fait ses courses, en remplissant sa soutane de denrées à chaque sacrement.

                Les higoumènes et les métropolites sont jouisseurs, violents, leur messe inaudible et ennuyeuse, les fidèles sont bigots. Sensualité du clergé. Sensualité de la religion des agas (pages 148 et 168). Kazantzaki indique, dans Lettre au Gréco, qu’il voulait être évêque, mais «  beaucoup plus tard, quand j’ai vu ce que faisaient les évêques, j’ai changé d’avis ; pour être digne de la sainteté que je désirais passionnément, je n’ai plus voulu faire rien de ce que font les évêques ».

                Chez Kazantzaki, autant que je le devine, la quête de Dieu s’opère en dehors de la religion ; c’est par exemple l’émerveillement de l’enfant devant la création, reconnue comme le jouet magnifique de Dieu ; ou bien c’est l’angoisse du lutteur dans la recherche mystique du visage de Dieu. « Le bois de la vraie croix c’est le courage » (La Liberté ou la mort, page 353) ou « le bois de la vraie croix, c’était tout simplement son cœur (le cœur de l’homme) » (ibidem page 329. Ces phrases nous ramènent à un homme qui cherche seul son chemin, à l’écart du clergé. C’est en dehors de la religion que Kazantzaki part, esprit torturé, à la recherche de Dieu[10]. Il existe pense-t-il, mais peut-être l’âme et le monde ne sont-ils qu’un même chaos, peut-être n’y a-t-il pas de salut, peut-être Dieu n’est-il que le visage du désespoir, peut-être n’est-il qu’un fauve terrible qui, tel Cronos dévore ses enfants les hommes ; ou peut-être n’apparaît-il, bon et glorieux qu’à un désespéré.

     

    VII) Portrait du capétan Michel : un surhomme appelé à mourir

    En bon Crétois, il porte le costume traditionnel avec le serre-tête. Ses yeux, barbe, moustaches, cheveux sont noirs (page 127). Une canine s’avance de sa bouche, signant son caractère de fauve : il est le « capétan Sanglier ».

    Il est hors du commun des hommes par sa force, son caractère implacable et intransigeant, son courage, trois traits qui font de lui un héros d’aventures. De sa force témoigne le fait qu’il a jeté Nouri bey sur le toit de son magasin, et seul, sans armes, a désarmé le nègre Souleiman dans un combat qui paraissait perdu d’avance. Il brise volontiers une chaise et force ses adversaires à lâcher leur arme en leur serrant le poignet. Nul ne peut discuter avec lui, ni sa femme qui l’aime, prête à mourir à sa place devant Souleïman, ni Gabriel Polyxinguis, l’autre capétan archange. Pour ne pas déchoir devant son fils, courageusement, sachant qu’il va à une mort presque certaine, il ira sauver Paraskévas  promis au massacre au milieu de plusieurs Turcs (pages 301-302). Ainsi, il refuse tout ce qui est indigne d’un homme comme la lâcheté et la faiblesse.

     

    Une morale : être « un homme »

    A ce titre il n’obéit à personne ; il n’aime pas que d’autres capétans comme Polyxinguis ou Elias lui fassent la leçon, il n’obéira pas aux demandes du Métropolite de déposer les armes.

    A ce titre,  il déteste l’instruction (page 284), car elle éloigne les garçons du vrai savoir : tirer, se battre, être courageux ; elle entraîne une dégénérescence de la virilité.

    Il déteste les lépreux : en effet ils l’écœurent car ils ne correspondent pas à  l’idéal humain du Crétois ; le lépreux est le contraire du fauve ; son corps rongé n’est pas celui plein de force et d’énergie de Michel. Ce mépris est celui qu’éprouvait pour eux le jeune Kazantzaki à Mégalo Kastro (Lettre au Gréco page 75).

    D’autres choses enfin l’écoeurent, comme les « manifestations sentimentales » (page 75) peut-être trop peu viriles, et les popes, probablement parce que les religieux ne sont pas des ascètes et qu’ils ont compromis la religion ; cependant il respecte Dieu (page 183).

     

    Ses démons

    Il est également exceptionnel par la violence des démons qui le hantent, véritable violence intérieure et  passionnelle dont il souffre : on lit page 92, dans La Liberté ou la Mort : «  « Qu’est-ce que je peux bien avoir ? … Je deviens fou ? » Le sang lui monta à la tête, ses yeux rougirent, il lui sembla que son cerveau allait éclater. » Puis suivent trois visions : la première de la Crète vue comme un monstre, la deuxième, ses ancêtres pendus à un grand platane, la troisième, Eminé qui l’appelle. Page 219, il voit le corps de son frère Manousakas, une grande flaque de sang au pied d’un chêne. Il est donc parcouru de démons qui rongent son cœur : ce sont le désir de libérer la Crète ; les ancêtres velus qui se lèvent en lui, comme des passions qui le tourmentent le poussent à la violence, la vengeance, et  la révolte ; l’amour enfin, honteux, qui le détourne de son devoir patriotique. Pour calmer ces démons, il chevauche sa jument hors de Candie ou enferme des bouffons dans sa cave pour manger, boire et oublier. Parfois il chasse les agas des cafés. Un coup de couteau dans sa propre cuisse l’apaise. Il souffre tant de voir la Crète asservie, qu’ il s’en prend à Dieu (page 147).

     

    Son désir de solitude

    Il est à  distance des autres et craint. Sa solitude désigne sa différence, de même que son désir d’habiter Dia (page 318), qui traduit une aspiration à l’infini, l’attente d’un univers dur et purifié des hommes, un goût ascétique de la solitude : des pierres, la mer amère et hostile, un désert où il aimerait vivre seul comme un moine, dans la pureté, et partant, dans la liberté.

    De même, il a le désir d’habiter parmi les fauves : « Les hommes sont vraiment insignifiants, des guignols, tous ! » (page 130) ; eau, verdure, hommes le dégoûtent. Mais il aime sa jument blanche et l’étalon noir de Nouri, fauves à son image.

     

    La mort promise       

              « La Liberté ou la Mort » est l’inscription que porte son drapeau page 322. Car à cette nature d’homme hors du monde, seule la mort au sommet de la Crète, sur le mont Séléna, semble une issue. Il se découvre en même temps comme le symbole de la Crète, un exemple de révolte et de liberté. Il accède ainsi à la fin du roman à l’abstrait, lui le combattant sauvage, fruste qui déteste les intellectuels : il se crucifie pour sauver la Crète.

     

    Michel, père de Kazantzaki

              Le capétan Michel est en partie à  l’image du père de l’auteur : dans Lettre au Gréco, Kazantzaki attribue à son père l’épisode du yatagan arraché à un Turc ivre et ivre de meurtre, qu’il donne à un enfant pour qu’il taille ses crayons, marque de mépris[11]

    Le père de Kazantzaki avait décidé de tuer sa femme et ses enfants si les Turcs attaquaient sa maison et y entraient : la situation se retrouve dans La Liberté ou la Mort.

    Il ressemblait à un cheval[12], hennissant, couvert de poils et fumant de sueur. Sa présence était insupportable, glaçant les personnes présentes dans la maison. Il était anticlérical. Il désirait, sombre, la liberté de la Crète. Tous ces traits se retrouvent dans le personnage du capétan Michel.

     

    VIII) Eminé et Noémi

    Eminé Hanoum, comme la veuve de Zorba le Grec, est un fauve à la souple démarche qui hume l’odeur des hommes. Le nom que le baptême lui aurait donné est Héléni, du nom d’Hélène de Troie, la beauté qui fut ravie et déclencha des guerres L’amour qu’elle inspire et qu’elle éprouve est physique.

                Eminé est le nom d’une fillette turque qui avait fait forte impression  à Kazantzaki (Lettre au Gréco page 43), une fillette à l’odeur de musc, comme son homonyme du roman.

     

              Noémi, l’épouse de Kosmas est un des rares personnages tendres, une des seules figures apitoyantes de ce livre aux héros cruels. Quand Kosmas la rencontre, elle allait se suicider, désespérée. Originaire de Russie, blonde et juive, « aux yeux pleins de douceur, d’abandon et de crainte », elle semble comme ses ancêtres, « tristes et persécutés » (page 431), résignée, à la différence des Crétois ; elle est l’héritière de la persécution, de l’horreur, de l’infamie et semble vouée à la peine. Jeune, maigre, pâle, fatiguée, angoissée, effrayée, semblant un cygne blessé dans le troupeau d’oies des ménagères, elle est rejetée par les Crétois. Semblant orpheline, détestée par sa belle-sœur, abandonnée par la Vierge qu’elle prie pour son fils, au mari décapité, perdant son bébé, convertie, elle se trouve à la fin du récit plus seule qu’au début.

              Kosmas est celui qui  la protège ; entre eux, moments de tendresse, moments de désir, parcelles d’éternité (page 455). Elle représente ce que l’homme a de plus précieux : l’amour, la vie : « La force de l’amour est immense », dit le narrateur de leur relation (page 454). L’échec de son intégration en Crète signifie le rejet de ces valeurs sentimentales par les Crétois, l’échec de l’espoir.

              Il représente également leur refus de s’ouvrir sur le monde, de la tolérance, de l’acceptation de l’autre.

              Noémi représente également l’univers de la Bible, la pensée juive : l’échec relatif de ses relations avec Kosmas peut symboliser une position théologique de Kazantzaki : amour, attirance, puis rejet de Yahvé, abandon de l’idée d’un dieu  vengeur et jaloux ; union improductive d’un Crétois métaphysiquement révolté et de la Bible, comme est inféconde l’union de Kosmas et de Noémi.

     

              En anagramme les noms d’Eminé et de Noémi se recoupent, l’une étant peut-être opposée à l’autre : l’une désirée de tous les mâles, l’autre méprisée et rejetée, même des femmes ; l’une que Polyxinguis laisse pour partir combattre dans la montagne, l’autre que Kosmas veut y emmener ; l’une pleine de vie, uniquement charnelle, audacieuse, l’autre maladive et incarnant un amour complet fait de désir et de tendresse.

     

     

    IX) L’aspect autobiographique

    Nombre de détails de La Liberté ou la Mort, l’œuvre ultime, se trouvent déjà présents dans Lettre au Gréco.  Dans cette œuvre romanesque, roman d’aventures nourri d’enlèvements, de batailles, de duels, Kazantzaki revient sur sa vie : certains personnages ressemblent à ceux de son enfance, d’autres à ses ancêtres ; ainsi il les fait renaître et leur rend hommage.

    D’autre part, l’ombre terrible du père plane sur l’œuvre : le personnage du capétan Michel est une recréation du père de Kazanzaki,

    Enfin le roman comporte comme l’autobiographie un déchiffrement du sens de l’existence, une interrogation sur ce que c’est qu’être Crétois, sur l’altérité qu’il y a à être un intellectuel en Crète.

     


    Index des personnages

     

    Agathangélos : moine tué à Angarathos (page 273).

    Ali Aga : turc débonnaire, petit vieux, pauvre et dépenaillé, voisin de Michel, à la voix d’eunuque, sans sexe précis. Il tricote, passe son temps avec les femmes et vit d’aumônes (pages 76-77 et 502-503). Page 502, après le soulèvement, il a dépéri. Il se retrouve peut-être dans Lettre au Gréco page 85 : « Le Turc qui vendait des couronnes de pain, l’homme glabre à la voix fluette ».

    Andrikos : fils de Krassogeorgis et ami de Thrassaki.

    Androulios, dit le Lutin :l’avorton qui a taillé la montagne et créé le village de Vénérato. Son histoire est pages 515-517.

    Archondoula (aussi orthographié Arkondoula) : vieille fille, fille de feu un drogman de Constantinople (page 57) son frère est sourd muet, un peintre marqué de petite vérole (pages 58 et 508). Chez elle, page 500, se rencontrent le pacha et le métropolite.

    Aristotélis : droguiste apothicaire dont les sœurs sont surnommées les Trois Grâces (Aglaé, Euphrosine dite Frossini, et Thaleia) ; il n’a pu se  marier ni avoir d’enfants, car il devait marier ses trois sœurs auparavant.

    Babali : aga tué à Zaro par un cousin d’Agathangélos (page 273).

    Babalaros : Léonidas, cafetier de Candie (page 113).

    Barbayanis : vendeur de glaces (sorbets au miel de caroube) et de salep (vendu chaud, arrosé de gimgembre), accoucheur (de sa nièce Pélagia par exemple). Portrait page 165. Sa femme serait coureuse (histoire drôle de son cocuage pages 61-62), et mère de Katinitsa (ou Katinitza) qui épouse Krassogeorgis. Il est le double et l’ami d’Effendine Crottin. Les cordonniers de la Grande-Rue se moquent de lui.

    Bertoldo, comte Manzavino : il vient de Zante, une des îles ioniennes ; vieux, efféminé et glabre, il enseigne la guitare et est compagnon de débauche du capétan. Bertoldo est son surnom, expliqué obscurément page 96.

    Braïmaki : neveu de Nouri (page 98).

    Capétan instituteur : maître d’école d’Ebaro, il joue de la lyra et sa musique exprime pour Sifakas le sens de la vie ( page 484):.

    Charitos : fils du berger Farounios ; apprenti ou commis,  et neveu du capétan Michel, 12 ans.

    Christina : épouse du capétan Manousakas, frère de Michel.

    Chryssanti :sœur jumelle (page 81) de Polyxinguis.

    Chryssoula : femme de Kostaros, mère de Kosmas.

    Chryssoula :nom chrétien attribué à Noémi.

    Constandis : fils de Manousakas.

    Despina : femme de Farounios.

    Diacre du Métropolite : il a des moustaches de sanglier, pages 202 et 500.

    Diamandis : frère de Vanguélio ; il est trouvé mort page 284.

    Dimitros, prénom de Pitsokolos, époux de dame Pénélope. Il erre dans la montagne avec son parapluie.

    Doxania, nourrice, gouvernante d’Idoménée.

    Effendine Crottin : habite la mosquée voisine de saint Minas près du tombeau d’un saint son ancêtre ; il aspire lui-même à la sainteté, mais aime le vin et le porc. Il a peur de traverser les rues.  Décrit pages 97-98 avec son turban linceul et son pagne de jute qui sont ses seuls vêtements. Son mysticisme le rend halluciné. Histoire de son aïeul pages 63-64. Il a vu son ancêtre lui cracher dessus page 145. Il se couvre le crâne de crottin quand il bat sa coulpe. Il dit des contes (page 273).Sa mère est Hamidé Moula, l’exorciceuse.

    Elias : vieux capétan borgne (page 159), héros de la révolution de 1821 rescapé d’Arcadi (page 363). Sa fille est Pélagia, qui épousera Pet-de-Loup ; il assiste à  l’agonie de Sifakas.

    Eminé Hanoum : femme aimée de Nouri, Poyxinguis et Michel, et admirée de beaucoup d’autres ; à la sensualité animale, elle évoque le fauve qu’aime le narrateur de Alexis Zorba. Pensées et passé page 332 : insatiable d’amours, comme la mer. Après son baptême, aurait dû s’appeler Héléni.

    Farounios : fils de Sifakas, voleur et berger sur le mont Dicté. Portrait page 199 : sa crainte amusante de sa femme Despina.

    Fatoumé : esclave du pacha.

    Frossaki : amour de Theodoris (page 251).

    Garouphalia : épouse de Kayambis le colporteur (page 47). Admirée par le pacha.

    Georgearos : Il accueille Ventousos, dans son village d’Anopoli, tout en cachant le décès de son fils. Ventousos cherchait un asile pour abriter sa famille pendant le soulèvement. Neveu de Zacharias (page 347).

    Grégori : pope à Saint-Jean, page 253.

    Hamidé Moula : mère d’Effendine Crottin ; exorciceuse.

    Haniali : père de Nouri, tué par Kostaros.

    Haralambis : jeune garçon du village de Sifakas, qui se bat avec Thrassaki pour pouvoir prendre la tête du groupe d’enfants (page 406).

    Haridimos : vieux berger au service de Sifakas (page 377). Il guide Kosmas vers le capétan Michel après la mort de Sifakas.

    Harilaos : voir Liondarakis.

    Haritos : ami de Thrassaki (chapitre 11).

    Hassan bey : chef turc qui part assiéger le monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ (page 337).

    Hatzigeorgis (dame Hatzigeorgis) : passant avec sa bru, elle voit revenir Nouri blessé.

    Hatzisavas, ou Hatzissavas : archéologue (pages 158 et 276), envoyé à Athènes (page 295).

    Henri : français ridicule qui suit la bande du Capétan Michel, page 398.

    Higoumène : il est le Saint Higoumène du monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ, portrait page 326 ; passé et exploit page 344 ; supplicié à Candie.

    Hilarion : sonneur sourd du monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ (page 350)

    Hodja ou Hodza : nom ou surnom du muezzin de Candie ; il aime les garçons ; pensées, pages 84-85 ; batailleur. Portrait pages 154 & 155.

    Hussein : cabaretier du grand café turc (page 148).

    Hussein : neveu de Nouri, tué par Theodoris.

    Ibrahim : guitariste aveugle qui joue pour Nouri bey (page 205).

    Idoménée : intellectuel ami de Pet-de-Loup ; page 186. Histoire pages 187-190. Il écrit aux grandes puissances. (Idoménée est le nom d’un roi légendaire de Crète, petit-fils de Minos, héros de la guerre de Troie). Sa nourrice s’appelle Doxania.

    Jasmina : bonne de dame Krassogeorgis, page 258.

    Kabanaros : vieux démogéronte sage qui siège page 327 au conseil des capétans.

    Kalio : vieille tante du Capétan Michel aux Koriakès (page 367), chez laquelle on laisse Eminé après son enlèvement.

    Karapas : ancien chef, page 363.

    Kartsonis : chien de Nouri.

    Kassapakis : docteur ; son histoire pages 54 et 295 ; sa femme est la française Marcelle, dite Masséla, décrite page 114. Il la trompe avec la bonne (page 507).

    Katérina : femme du capétan Michel, fille du capétan Thrassivoulos Rouvas.

    Katinitsa ou Katinitza : fille de Barbayanis, épouse de Krassogeorgis.

    Kathérinio : une vieille femme ; mère de Kokolios, garde champêtre de Saint-Jean (page 253) ; elle meurt page 255.

    Katsirmas : capétan centenaire, (pages 481-484) ; double de l’aïeul pirate de Kazantzaki évoqué dans la Lettre au Gréco (mêmes détails : chargements de cannelle, natte sur son crâne rasé, allié à des Algériens).

    Kayambis : sfakiote, colporteur, jeune marié époux de Garouphalia. Il a tué son frère (page 48).                                              Il meurt avec Michel au mont Séléna, page 522.

    Khristophis : fils de Sifakas, assassiné avec ses deux fils dix ans auparavant.

    Kokolios : garde- champêtre à Saint-Jean, fils de Kathérinio.

    Kollyva : nom comique (explications pages 191 et 253 : il a le nom qu’on donne au gâteau des morts) du croque-mort et de sa femme, qui habille sa famille avec les vêtements des morts. Sa femme meurt page 196. Père de Lénio.

      Korakas :  capétan mythique, page 480.

      Kosmas : fils de Kostaros (page 390), petit-fils de Sifakas, expatrié, européanisé, époux de Noémi la juive, il attend un fils mais il ressent l’appel à combattre ; il évoque le narrateur.

    Kostandaros : berger du mont Ida qui aurait châtré Kriaras (page 420).

      Kostandinia : vieille femme aux quatre fils fusillés (page 463).

      Kostandis : berger de Sifakas (page 447). Histoire page 460.

    Kostandis : fils de Nicoli, petit-fils de Sifakas (page 469). Il guide Kosmas dans la montagne vers Sifakas. Plusieurs exploits guerriers au service du capétan Vlahos : il a tué Hussein l’Albanais.

     Kostaros : fils de Sifakas, époux de Chryssoula, père de Kosmas et Maria ; il a égorgé le père de Nouri bey ; mort au siège du monastère d’Arcadi.

    Koubélina : vieille femme victime des Turcs, chez qui logent Kosmas et Kostandis (page 463).

    Krassogeorgis : riche paysan voisin du Capétan, père d’Andrikos et époux de Katinitsa, la fille de Barbayanis. Il combat au mont Séléna, mais quitte le capétan Michel avant l’assaut final.

    Kriaras : rimeur itinérant qui passe chez Sifakas (pages 420 et 473).

    Lénio : feue la femme de Sifakas. Fille de Minotis.

    Lénio :fille de Kollyva.

    Lévi : jeune incendiaire ami de Thrassaki.

    Liondarakis, Harilaos : changeur, banquier, usurier et nabot, enrichi par les soulèvements ; portrait pages 100, 120 et 186. Il a le mauvais œil.

    Mandakas : vieux capétan ; portrait page 324 : c’est un guerrier chaste, chaste pendant la guerre, un chaste tueur. Pages 476-481, il fait venir sa bouteille remplie d’oreilles coupées et expose, à la demande de Sifakas, quel est le sens de sa vie.

    Manolakis : tailleur beau-frère du capétan Michel.

    Manoli : vrai nom de Ventousos.

    Manolio : fils de Mastrapas, copain de Thrassaki.

    Manolis : pope de Candie. Une épouse.

    Manousakas : 60 ans, frère du Capétan, qui a mené un âne à la mosquée dire ses prières. Habite à Saint-Jean à une heure de Pétroképhalo. Histoire de son mariage avec une fraîche veuve de capétan, Christina (pages 68-69). 40 ans en 1866. Laboureur. Père de Théodoris, Yanakos et Constandis. Tué par Nouri Bey.

    Marcelle, dite Masséla : femme de Kassakapis le docteur.

    Maria : esclave noire de Nouri et vieille nourrice d’Eminé Hanoum.

    Maria : sœur de Kosmas, fille de Kostaros, folle, (page 429).

    Marioria : vieille parente de Pet-de-Loup, qui aide au ménage et à la cuisine (page 284).

    Maroulio : jeune bonne de dame Pénélope.

    Maroussia : arménienne de Candie et femme légère (page 124).

    Marousio : épouse de Ventousos.

    Mastrapas : marchand de grelots, père de Manolio ; sa femme l’attache la nuit (même histoire dans Lettre au Gréco, page 51, à propos de l’oncle Nicolaki) ; l’anecdote des grelots mal accordés qui l’empêchent de dormir, page 300 de La Liberté ou la mort, se trouve aussi au début de Lettre au Gréco.)

    Mastrapas : nom d’un ancien chef (page 363).

    Mavrolios : a trouvé dans son champ une jarre antique ornée de bras de pieuvres.

    Mavroudis, dit Scarabée d’or : usurier avare et notable de Candie (page 159). Ami de Sélim Aga (page 165).

    Mavroudis : crieur public du village, qui passe chez Sifakas (page 379).

    Métropolite : 80 ans, archevêque, ex archimandrite à Kiev à l’aspect majestueux (voir pages 90 et 312) ; portrait moral page 160 ; a eu une vision du Christ page 122.

    Michel : fils de Sifakas, petit-fils de Michel le Fol, il est dit « capétan sanglier » à cause de sa canine rebelle. Trois enfants : Rinio, Thrassaki, une fille bébé page 278. Tient un magasin. Chef de guerre hanté par ses démons, il meurt au mont Séléna.

    Mistigri : voir Yanaros.

    Mitros : evzone Rouméliote  de Kapénisi, débarqué par Stéphanis pour combattre en Crète, page 383.

    Mourtzouflos : vieux bedeau de Saint Minas, affreux bonhomme de 75 ans ; il a surnommé les cloches de Saint Minas Liberté, Mort et Saint Minas. A dessiné la Crète crucifiée. Ce n’est pas lui le diacre.

    Moustapha Baba : vieux guérisseur turc pages 207 et 447. Désintéressé. Il soigne et Nouri Bey et Sifakas.

    Muezzin de Candie, hodja ou hodza : au turban vert et à la voix mélodieuse,  il appelle à la guerre et au massacre ; il a deux fils (page 257) et aime les garçons. Portrait pages 154 et 155. Tué par Michel au mont Séléna.

    Nicéphore : illustre roi qui a fondé le Monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ, page 342.

    Nicodème : moine dont Ventousos utilise les talents de peintre. 

    Nicolas : fils de Yanaros.

    Nicoli : fils de Sifakas, père de Kostandis, page 469.

    Noémi : femme juive de Kosmas, blonde et convertie, rebaptisée Chryssoula du nom de la mère de Kosmas.

    Nouri bey : un « fauve »  amoureux d’Eminé (page16), fils d’Haniali le buveur de sang ; double et frère adoptif du Capétan (« ils étaient nés dans le même village » pages 25-28) ; renommé pour sa beauté, sa droiture, sa générosité (page 27) ; meurt des suites de son duel avec Manousakas. En représailles le fils de Manousakas, Théodoris, tuera le neveu de Nouri Bey, Hussein.

    Pacha : originaire de Brousse (ou Bursa, ville de Turquie au sud-est de la mer de Marmara, ancienne capitale de l’empire ottoman de 1327 à 1453).

    Pahoumios : ascète qui confesse le métropolite, résidant au monastère de Koudouma (page 355).

    Paraskévas : syriote (de Syros) et coiffeur ; père d’une fillette surnommée Charmille et capturée par la bande de Thrassaki. Il meurt page 305.

    Patasmos, dit Belzébuth, dit capétan Pieds-Fourchus : ami de Manousakas, joueur de lyra (page 221).

    Patéros : directeur de l’école primaire, père d’Anika qu’il veut préserver de la sexualité (souvenir relaté dans Lettre au Gréco, page 56, à propos de Terpsichore, la fille du maître d’école Périandre Crassakis ; un autre maître dans Lettre au Gréco s’appelait Patéropoulos, pages 50 et 54).

    Pélagia, orthographié aussi Pégalia : fille du capétan Elias, deuxième femme de Pet-de-Loup.

    Pénélope : femme de Dimitros Pitsikolos.

    Pet-de-Loup : frère du Capétan, instituteur, bossu et chahuté par ses élèves ; après avoir tué sa femme, Vanguélio, il se métamorphosera en Crétois dur et viril, brûlera ses vêtements européens, épousera la petite-fille du capétan Elias, Pélagia, et reprendra son vrai nom de Yanacos. Il représente l’intellectuel méprisé par sa famille et est à ce titre un double de l’auteur : on lit dans Lettre au Gréco page 240 « Il déshonore notre lignée (…) Moi hélas ! J’étais le maître d’école de ma famille. »

    Photios : moine médecin du monastère de Notre-Seigneur-Jésus-Christ (page 352).

    Pitsokolos Dimitros : herboriste, fils de capétan,  époux de Pénélope, il note tout ce qu’il mange avec gourmandise (page 59) ; voisin de Michel. Part dans la montagne avec son parapluie page 259 ; revient amaigri et angoissé après les combats chez son épouse, page 507. (Même personnage, un certain Dimitri époux d’une dame Pénélope, fou, dans Lettre au Gréco, page 58).

    Polyxinguis, Georges : boutiquier à la porte de La Canée ; célèbre pour sa séduction ; rival de Michel ; un des chefs de la révolte ; la mort d’Eminé le ravagera. Portrait pages 80-83, page 191.

    Rabbin de Candie : vieillard innocent et doux dont Thrassaki brûle la maison ; portrait page 178.

    Rinio : fille du capétan Michel, 15 ans environ page 38 ; page 203, son père ne la reconnaît pas.

    Rousheina : négresse rieuse de Candie qui vend des galettes au sésame (page 84).

    Rouvas Thrassivoulos, :capétan héroïque et supplicié, père de Katérina, grand-père de Thrassaki.

    Sélim : un aga sage et riche (page 151).

    Sifakas : père de 11 fils, dont Manousakas, Fanourios, Nicoli, Kostaros, Michel, Khristophis (page 65), Pet-de-Loup, et de 4 filles. Patriarche centenaire et quasi légendaire. Sa femme s’appelait Lénio, sa belle-mère Malamo. Récit de son mariage page 458. Il a appris à écrire pour pouvoir peindre le slogan « La Liberté ou la Mort »[13].

    Somas : boulanger, neveu de Stéphanis. Page 193.

    Souleiman  ou Souleïman, dit Sélim page 426 : serviteur noir du Pacha, palefrenier ; il veut tuer Michel page 308.

    Sourmélis : célèbre capitaine du pyroscaphe Seidam Mandéli, page 385.

    Stéphanis : capitaine boiteux. Son bateau s’appelait La Gaillarde. Sa famille est évoquée page 193. Compère de Polyxinguis. Il part à Syra demander l’aide de la Grèce (page 346), obtient un bateau, le Miaoulis, qui accoste près de chez Sifakas, chargé de munitions et de nourriture (pages 379 et 388) ; il meurt (page 495), les deux jambes arrachées par un boulet.

    Stratis : ami de Manousakas (page 221).

    Stavroulios : le menuisier qui fait le  cercueil de Sifakas.

    Théodoris : fils aîné de Manousakas (210). Il le venge en tuant Hussein le neveu de Nouri. Devenu capétan, il met le feu au village turc de Lassithi (page 274). Mort avec Michel au mont Séléna (page 523).

    Thrassaki : fils de Michel.

    Touloupanas : boulanger dont le fils est lépreux, (pages 53, 84). Ne veut pas quitter Candie pour combattre, afin de pouvoir s’occuper de son fils.

    Trialonis : capétan nabot et instruit.

    Vanguélio : fiancée puis épouse de Pet-de-Loup. 35 ans. Nièce de Polyxinguis. Elle affectionne son frère Diamandis, que Pet-de-Loup empoisonne. Vanguélio se pend alors.

    Ventousos, la « ventouse » : surnom de Manoli, le « fameux joueur de lyra » ; cabaretier qui a fait peindre une Vierge aux grappes de raisin par le moine Nicodème ; époux de Marousio (page 94), il a 2 filles et un frère négociant à Candie. Page 347 il met sa famille à l’abri chez Georgearos, qui ne dit pas qu’il est en deuil et lui offre l’hospitalité. Mort page 524 avec Michel au mont Séléna.

    Yakoumi : capétan ami de Stéphanis

    Yakouris : sentinelle (page 359).

    Yanacos : fils adoptif de Mandakas (page 477).

    Yanacos : vrai nom de Pet-de-loup (page 396).

    Yanakos : fils de Manousakas, page 210.

    Yanaris : un ancien chef, page 363.

    Yanaros, dit « Mistigri » à cause de ses moustaches : le teinturier syriote, père de Nicolas ; sa femme le bat (page 95). Il danse volontiers et s’occupe de Bertoldo souvent. Mort (page 524) avec Michel au mont Séléna.

    Yanaros : un combattant du groupe de Michel (page 519), il quitte le combat avant l’assaut final.

    Zacharias : oncle de Georgearos. Portrait page 349.

     

    Lexique des noms communs et index des hommes célèbres.

     

    aga, ou agha, page 135 : dignitaire musulman ; nom donné aux officiers subalternes.

    Androutos, Odysséas page 224 : héros crétois de 1821.

    baïram pages 206 , 297, 303 : mot turc, désignant deux fêtes principales des musulmans ; l’une se célèbre après le jeune du ramadan , l’autre 70 jours après.

    baume-coq, plante, page 442

    Bengazienne  page 99 : Benghazi est en Lybie.

    brikis page 149 : casserole ( voir la note 1 page 149)

    Brousse ou Bursa, ville de Turquie au sud-est de la mer de Marmara, ancienne capitale de l’empire ottoman de 1327 à 1453

    cagerotte, page 458 : sorte de claie servant à égoutter les fromages.

    Canaris Constandi, voir Kanaris.

    caragueuz ou Karaghueuz page 235 : le guignol

    caroube (ou carouge) : fruit ; le caroubier est un grand arbre méditerranéen à feuilles persistantes.

    cédrat, agrume plus gros que le citron servant en confiserie, en pâtisserie, en parfumerie.

    chibouk, ou chibouque, page 425, pipe à long tuyau.

    Circassie : région au nord du Caucase.

    Colocotronis ou Kolokotronis, Théodoros page 224 : Ramavouni 1770-Athènes 1843 ; homme politique et chef militaire de la guerre d’Indépendance (1821-1831) ; héros crétois.

    Daskaloyanis page 224 : héros crétois.

    Diakos Athanasios.

    drogman : interprète officiel.

    evzone page 383 : soldat de l’infanterie grecque vêtu de la fustanelle.

    firman page 67 : ordre écrit provenant d’un souverain, en  Iran et Turquie.

    giaour : terme de mépris désignant les non musulmans.

    gimblette : pâtisserie dure et sèche en forme d’anneau.

    Gorgone : d’après une légende, sœur d’Alexandre, gisant sur la mer et déchaînant des révoltes (La Liberté ou la mort, pages 92 et 93). Dans Lettre au Gréco, page 45,  Kazantzaki évoque la légende de cette sirène sœur d’Alexandre qui frappe la mer à grands coups de queue.

    haïk : voile carré ou rectangulaire porté par les femmes musulmanes par dessus le vêtement.

    hanoum : femme.

    Hatzimihalis page 224 : héros crétois.

    higoumène : supérieur d’ un monastère orthodoxe.

    Kanaris, ou Canaris, Constandi ou Konstandinos, amiral et homme politique grec, né à Psara vers 1790 et mort à Athènes en 1877 ; il joua un grand rôle dans la guerre de l’Indépendance hellénique. Plusieurs fois ministre de la Marine et chef du gouvernement. Qualifié page 82 d’« héroïque incendiaire ».

    Karaïskasis page 224 : héros crétois de 1821.

    khan (de la veuve, page 67) mot persan : abri pour les voyageurs.

    Kolokotronis : voir Colocotronis.

    Korakas page 224 : héros crétois, chef de Messara (15).

    Kriaris page 224 : héros crétois.

    lentisque : arbrisseau voisin du pistachier, dont on mâche la résine, appelée mastic.

    litsam ou litham, page 426 : voile dont les femmes musulmanes se couvrent le visage.

    lyra, page 194 : archet pourvu de grelots.

    marguillier page 80 : membre du conseil de fabrique d’une paroisse.

    medjidié page 81 : monnaie

    Miaoulis, pages 224 et  391 (Andréas Vokos, dit Miaoulis (1768-1835) : né à Nègrepont, c’est-à-dire en Eubée ; héros crétois de 1821 qui a inspiré à Stéphanis le nom de son bateau pages 388-391. Amiral qui commanda les forces navales des insurgés grecs.

    mirabeau page 295: chapeau haut.

    Moréïte : habitant du Péloponnèse ; Morée est le nom donné au Péloponnèse après la 4ème croisade.

    oke : pages 154 & 203 : mesure ou contenance comme la barrique ou le litre.

    pachalik, page 257 : territoire soumis au gouvernement d’un pacha.

    pallikare : du grec pallikari, nom donné aux braves, albanais ou grecs, qui combattaient les Turcs pendant la guerre d’indépendance (1821-1828).

    Pamboudakis, Constantin, page 364 ; nom du combattant qui a fait exploser le monastère d’Arcadi.

    pendozali, page 204 : une danse.

    raïa, ou raya : sujet non musulman de l’empire turc.

    rifle, page 330 : carabine à long canon.

    Roumélie : nom donné jusqu’au 16ème siècle par les Ottomans à l’ensemble de leurs provinces européennes (Thrace, Macédoine) conquises au 14ème siècle. Il existait en 1878 une province de Roumélie orientale.

    Saint Minas : fête le 11 novembre ; son fantôme apparaît pages 50 et 311, fantôme auquel Effendine Crottin croit. Dans Lettre au Gréco, pages 78 et 79 se trouvent des anecdotes qui disent que les Turcs le craignaient, tentaient de se le concilier et qu’on croyait en son fantôme. Le père de Kazantzaki lui rendait un culte (page 27 de Lettre au Gréco).

    salep, page 501 : farine alimentaire tirée des tubercules desséchés de certaines orchidées ; vendu chaud et couvert de gingembre  comme boisson par Barbayanis.

    senne : filet de pêche triangulaire..

    serdar, page 337 : chef.

    Soude : port qu’Idoménée veut faire combler ; c’est le port de la Canée en Crète ; baie vaste et abritée, actuellement base stratégique de l’Otan.

    Syra ou Syros : île grecque, une des Cyclades, où se tient le comité crétois et où Stéphanis va chercher de l’aide ; une des rares à ne pas être occupée par les Turcs.

    Zante ou Zakhynthos : ville d’origine de Bertoldo ; une des îles ioniennes autrefois citadelle vénitienne.

    Zaptié, page 298 : corps de troupe ottoman qui faisait aussi la police.

     

     

     


    [1]  Lettre au Gréco, publié en 1956 aux éditions Plon dans la traduction de Michel Saunier, est une autobiographie intellectuelle où Kazantzaki vient rendre compte de sa vie devant son compatriote, le Gréco.

    [2] Les tremblements de terre sont également évoqués dans Lettre au Gréco page 66.

    [3] Cf. Lettre au Gréco page 316 : cette histoire est arrivée à Kazantzaki lui-même.

    [4] Lettre au Gréco page 345.

    [5] Lettre au Gréco, page 239.

    [6] Page 540.

    [7] Lettre au Gréco page 147.

    [8] On trouve la même image dans la Lettre au Gréco page 131 : « C’était un monstre marin, une sirène, avec une multitude de seins, étendue à la renverse sur les vagues, et qui se chauffait au soleil. J’apercevais nettement, dans le soleil matinal, son visage, ses mains, sa queue, ses seins dressés… »

    [9] « ..il (Zorba) s’agrippa à l’embrasure, regarda au loin vers les montagnes, écarquilla les yeux et se mit à rire, puis à hennir comme un cheval. C’est ainsi, debout, les ongles enfoncés dans la fenêtre, qu’il est mort. » Alexis Zorba page 348, éditions Presses Pocket.

    [10] Le rabbin de La Liberté ou la mort a toute la sympathie du narrateur : il est comme son frère de foi, à la recherche de l’Eternel (pages 178-179).

    [11] Lettre au Gréco, page 26, La Liberté ou la mort pages 256-257.

    [12] Page 26, Lettre au Gréco.

    [13] Ce qu’écrit Kazantzaki du mot « massacre » s’applique au slogan « la Liberté ou la Mort » : « J’ai écrit le mot « massacre » et les cheveux se sont dressés sur ma tête. Car ce mot, quand j’étais enfant, ce n’était pas huit lettres de l’alphabet alignées l’une à la suite de l’autre, c’était une grande rumeur, des pieds qui ruaient dans les portes, d’affreux visages qui tenaient des poignards entre leurs dents, et de partout dans le quartier des femmes qui hurlaient, des hommes à genoux derrière les portes, qui chargeaient leur fusil… Et il y a quelques autres mots, pour nous qui avons vécu enfants à cette époque en Crète, qui ruissellent de sang et de larmes et sur quoi un peuple entier est crucifié, les mots : liberté, saint Minas, Christ, révolution… » (Lettre au Gréco, page 86).


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